"J'étais étranger et vous m'avez accueilli"
Le Réseau Chrétien - Immigrés (RCI) s’est constitué depuis 2000 à Paris en lien avec une quinzaine de paroisses et de mouvements proches (Cimade, Secours Catholique, Maison Bakhita, Mission et Migrations...), à partir de la communauté de St Merry qui avait lancé une réflexion pour un changement de regard sur les personnes "sans-papiers", au moment de leur irruption dans le paysage public, en particulier après l'évacuation policière de l'église St Bernard de la Chapelle en 1996.
Sous la présidence à l’origine d’Elena Lasida, qui depuis a passé le relais (actuel président Jean-Jacques Lambert, après Nathalie Baschet), l’association, loi 1901, regroupe une cinquantaine de bénévoles engagés.
L’esprit général est le suivant : pas tant porte-parole des migrants, que l’expression d’une démarche commune. C’est-à-dire un travail le plus possible paritaire, en réciprocité. Se laisser transformer par l’expérience première du migrant, toujours saisissante...
L’objectif du RCI est double, cherchant à allier réflexion et action :
- soutenir concrètement les personnes migrantes dans leur cheminement d’insertion
- sensibiliser les communautés chrétiennes, et au-delà l’opinion publique et les décideurs, aux grandes difficultés vécues par les immigrés, notamment ceux en quête d'un titre de séjour.
Charte du RCI
A la fin des années 90, des sans-papiers, bien que non chrétiens pour la plupart, ont vu dans nos églises des lieux d’accueil et de protection. L’Evangile leur donnait raison : « J’étais étranger et vous m’avez accueilli. » (Matthieu 25 - 35). Pour autant des chrétiens ont été bousculés par leur démarche, et l’Eglise a pu sembler parfois silencieuse. Interpelés par le mouvement de ces sans-papiers et par les réactions de ces chrétiens, nous avons créé le RCI.
. Une démarche avec les migrants
Cette tension nous a amenés à réfléchir à ce qui poussait ces femmes et ces hommes à migrer. L’accueil – ou le non accueil – que nous leur réservions nous interrogeait comme chrétiens, comme citoyens…
Dès l’origine, nous avons partagé cette réflexion et cette interpellation avec nos communautés. Convaincus que nos actions de sensibilisation n’étaient légitimes que si elles étaient incarnées dans la rencontre et dans la relation avec les migrants, nous avons d’emblée donné la parole à celles et ceux qui ne l’avaient pas. Progressivement, une circulation nécessaire s’est mise en place entre réflexion et actions de solidarité concrète, fondant la marche du RCI sur ses deux jambes.
. L’universel et l’intime
Dans la réflexion, nous formulons une vision de l’homme, du destin de l’humanité, une vision citoyenne, politique, philosophique qui rejoint l’intime dans la rencontre concrète avec des personnes et leurs histoires singulières : nous ne devons jamais perdre de vue qu’elles ne se réduisent ni à un statut technique ni à un statut juridique.
Ces rencontres et ces échanges avec les migrants ont façonné et renforcé nos convictions au fil du temps. Ce cheminement nous a fait comprendre qu’il fallait aborder les questions de migrations autrement : il ne s’agit pas de s’opposer à un mouvement qu’aucun mur n’arrêtera mais de l’accompagner, de chercher à l’organiser, de révéler toute sa fécondité.
Notre parcours et la conviction que nous sommes tous frères et sœurs en humanité, nous conduisent à reconnaître aujourd’hui la liberté totale de chaque être humain à circuler et à s’installer là où il le désire sur cette terre. Toutes les civilisations sont fondées sur cette liberté.
Et sur la base de quels principes pourrions-nous dénier à certains le droit de quitter leur pays – le plus clair du temps par nécessité – quand nous acceptons sans réserve que d’autres aient le droit de s’expatrier par choix ?
2018