La législation migrants - réfugiés est terriblement répressive...
La loi du 26 janvier 2024, adoptée par défaut après la censure du Conseil Constitutionnel, reste bien problématique. Outre tout un train de mesures écornant gravement les principes républicains, ce qui frappe aussi, c'est que ne sont pas traitées les demandes les plus pressantes rencontrées sur le terrain, en particulier à la permanence du RCI-Cimade : disposer d'un statut stable, se loger, se nourrir, être en capacité de vivre dignement, dans le respect de la vie privée et familiale.
Tout être humain a des droits minimums, doit pouvoir bénéficier des services de base (Pacte ONU de Marrakech déc 2018). C'est en ce sens que le RCI, comme l'ensemble de ses partenaires associatifs, interpellent vigoureusement les politiques. La France et l'Europe ont aujourd'hui gravement tendance à se blinder. Or, à chaque instant, resurgissent ces questions "existentielles" : accueil, accompagnement, hébergement, subsistance, reconnaissance...
En termes de communication et médiatisation, au-delà des modes d'intervention traditionnels, le Réseau, s'efforce avec d'autres (cf. l'action de Sant'Egidio-notamment les "couloirs humanitaires"- ou VoxPublic, etc.) de montrer qu'il existe une France accueillante ; il s'agit de mettre en valeur les multiples initiatives citoyennnes développées un peu partout d'aides aux migrants, de "buzzer", de faire bouger les représentations collectives, et finalement de subvertir la ligne politique officielle.
Un Pacte sur l'immigration et l'asile a été adopté le 14 mai 2024 par le Conseil de l'Union Européenne.
Il durcit sensiblement les conditions d'entrée. Il vise à mettre en place une gestion coordonnée des frontières au niveau européen. Il se focalise sur les arrivées des personnes sans titre de séjour [dont il faut bien dire qu'elles sont loin de représenter l'essentiel des flux migratoires, la plupart entrent régulièrement : regroupement familial, étudiants, permis de travail...]
L'Europe tente de se barricader, telle une forteresse.
Le Pacte met en place un enregistrement systématique aux frontières des 27, avec filtrage, et procédure accélérée pour les demandeurs d'asile venant de pays considérés comme "sûrs". Les arrivants sans titre de séjour sont automatiquement placés en zone d'attente (avec démultiplication des centres de rétention). Les déboutés, renvoyés... y compris en les emprisonnant dans des pays tiers d'externalisation -ce qui en passant pourrait être considéré comme un traitement inhumain et dégradant.
Un mécanisme de solidarité entre Etats est prévu. Tous les ans, 30 000 migrants régularisés devraient ainsi être "relocalisés" vers un autre pays que ceux en première ligne d'arrivée (Grèce, Italie, Espagne). Ceux qui refuseraient (Hongrie, etc.) ont la possibilité de s'acquitter à la place d'une somme de 20 000 € par migrant.
On peut être dubitatif vis-à-vis d'un tel Pacte, dont l'arrière-pensée réside en fait à ne pas laisser le champ complètement libre à l'extrême droite, laquelle préfèrerait en revenir à une gestion des migrations purement nationale. En courant après les pires idées ? Les migrants et réfugiés, des ennemis dont il faudrait se défendre ? Les études en la matière montreraient plutôt que pas mal de citoyens ont une vision plus positive !
L'essentiel des textes reste hors-champ : l'harmonisation des voies légales d'entrée en Europe et des procédures d'asile relève toujours de la compétence de chaque Etat.
Au total, ce Pacte présente plutôt un goût amer, comme une machine supplémentaire à créer des "sans-papiers". Les frontières : des barrières (toujours plus dangereusement contournables) ou... des "lieux de passage et de rencontre" (comme l'ont déclaré plusieurs évêques) ?
Où sont les droits humains, chers à l'esprit initial de l'Union européenne ? Où va l'Europe ? Les élections de juin 2024 confirment une funeste évolution, avec l'expression forte d'un repli identitaire. Vivement un sursaut des consciences ! Une sensiblisation urgente de l'opinion, à visage humain, est entre nos mains...